Writing on a web

J'ai traversé une période d'hibernation assez étrange.

Pour m'en sortir, il a fallu que je crée un nouveau blog, pour y concaténer (yes, j'adore les termes techniques !) tout ce qui avait trait à une période de ma vie que j'espère bien laisser derrière moi comme une vieille peau.

Ce matin, alors que je râlais sous ma couette comme à mon habitude avant de me précipiter sous la douche, je me suis aperçue que ça me plaisait bien d'être en train de fulminer contre le réveil qui me forçait à entamer cette nouvelle journée si tôt.

Je viens juste de déposer sur l'une des piles qui squattent ma descente de lit (toute théorique, n'allez pas vous imaginer que je suis de celles qui supportent de poser leurs petons sur des choses velues ou poilues ou tissues dès le réveil, je déteste les acariens), ce gros pavé qui m'a occupée pendant presque un mois.

L'auteur mène une enquête pour tenter de savoir ce qu'il est advenu de six membres de sa famille assassinés lors de la Shoah.

Le livre est passionnant, bouleversant et très éprouvant. Un grand livre.

On a la chance de vivre dans un pays magnifique, avec beaucoup de ponts, beaucoup de voitures et beaucoup de perspectives.

Comme me l'a dit très justement je ne sais plus qui l'autre soir (déjà que je ne vois pas beaucoup de monde, si en plus je me mets à mélanger les gens qui disent des choses aussi intéressantes...), si on fait des études au lycée français de New York, on peut devenir Premier ministre, comme Dominique de Villepin. C'est un signe qui ne trompe pas.

Quand on entend des choses pareilles, surtout prononcées sur un ton docte et dans le cadre d'une réunion de parents d'élèves de gauche, ça fait réfléchir. Aux putains de rêves qui nous bouchent la vue.

Moi je veux bien que tout le monde rêve de devenir Premier ministre (quoique, il faut reconnaître que le dernier occupant a tendance à ne pas trop faire de pub pour la fonction...), mais il faut prendre le risque de le dire : il y aura peu d'élus.

Il faut bien le dire : il y aura tout aussi peu au final de footballeurs scandaleusement surpayés que de patrons tout aussi scandaleusement surpayés.

Je me demandais l'autre soir si ma lucidité ne proviendrait pas de mon incapacité à taper dans un ballon et à diriger un gouvernement ou à dessiner. Ben oui, si j'avais été dotée de qualités physiques extraordinaires, d'un intellect au-dessus de la moyenne, d'un coup de crayon mortel, je serais certainement à l'heure actuelle très satisfaite de mon sort. Mon ego conforté, lustré, fringant et rutilant me permettrait de voir de haut toutes choses et je saurais que le monde est bien fait puisque j'aurais obtenu le meilleur qu'il a à offrir. La reconnaissance de mon talent, de mes qualités et des tas de pépettes.

Sauf que comme les places sont rares, elles sont réservées aux meilleurs et il n'y en aura pas pour tout le monde. Pour les autres, les médiocres, les vouzémoi, c'est courses au supermarché et vie de merde, c'est normal, c'est comme ça, fallait être bons.

Et en plus, on vous remercie de ne pas nous faire chier avec vos aigreurs et de ne pas être envieux : ce n'est pas classe et vous puez de la gueule. Un peu de dignité, que diable !

Hé bé, dans le genre foutage de gueule, je trouve que c'est réussi, et je me demande par quelle aberration on gobe encore ce baratin.

Si tous les gens qui travaillent
finissent par en finir,
les chômeurs vont avoir du travail,
c'est chouette !

Deux jours que je traîne comme une zombie, avec l'énergie d'une pâte molle...

Ce matin, énorme grasse matinée (lever 10 h 15, du jamais vu depuis des années), malheureusement un peu gâchée par une non moins énorme culpabilité. J'ai du mal à assumer ma fainéantise. Pourtant dès la semaine prochaine, je vais devoir me lever à 7 heures, je ferais mieux d'en profiter !

Il faut de nouveau que je cherche du boulot, je commence à en avoir plein le dos !

Petit bilan sur mes dernières aventures dans le monde de le travail (c'est pareil partout, je saaaais) :

• Départ sur les jantes d'un boulot dévorant en milieu largement hostile avec procès aux prud'hommes car trop c'est trop
• 8 mois dans un service de grands malades (entre autres une élue du personnel maniak, un fou manipulateur et un facho qui se la pétait Grand d'Espagne) avec atteintes répétées à ma sérénité
  
• Une semaine avec une tapée qui se prenait pour la Tour Eiffel
• Quelques mois à faire un boulot pas trop mal mais vraiment payé au lance-pierres et réclamant une totale abnégation (précarité maximum + disponibilité maximum + brouzouf minimum, c'est la mode, je saaaaaaaaaaais)
• Obligation de devenir free lance pour travailler (quand on ne gagne pas bien sa vie, qu'on ne peut donc pas capitaliser, cela équivaut à travailler sans filet, frisson garanti). Comme c'est la crise, les boîtes ont tendance à moins donner de travail en externe, du coup, je me retrouve un peu le bec dans l'eau.

Pour le moment, mon état d'esprit frôle le gros ras le bol :

Ras le bol que le monde du travail soit un panier de crabes où prospèrent impunément les pires des sales races... 

Ras le bol que le monde du travail soit le monde du foutage de gueule et que les rapports humains y soient fondés sur l'humiliation et l'asservissement...

Ras le bol d'avoir tellement travaillé pour si peu au final...

Ras le bol des gens qui se chantent que tout va très bien, Madame la marquise et qui voudraient en plus vous faire apprendre la chanson de force...

Ras le bol
de ras le bol
ras le bol
de ras le bol !

Les beaux jours sont fertiles en confrontations rapides, fortuites ou organisées avec les copains, les relations, les humains de notre entourage.

Face à un quadragénaire propre, lustré et prospère, je me pose des questions. Il brandit sa réussite sociale avec une telle emphase et un tel entrain... Il regarde avec condescendance ceux qui lui paraissent inférieurs - dont je fais partie - et sa réussite lui paraît plus éclatante encore, par rapport à ce qu'il considère comme mon échec.

Sa sensibilité de gauche reste peu chatouilleuse : il considère que les victimes l'ont bien cherché, que les problèmes arrivent à ceux qui les cherchent et tout lui donne raison si on va par là.

Il entend que ses enfants jouissent des privilèges qu'il considère comme leur revenant de droit et il est prêt à se battre pour cette grande cause.

Il vient d'un milieu populaire mais il mourrait plutôt que d'en porter la trace. Il n'avouera jamais qu'il vote à droite, car il fréquente désormais un milieu à tendance artistique et créative qui se ferait arracher l'œil plutôt que de mal penser, mais ça change quoi, finalement ?

Et on s'est tapé les sales embouteillages pour aller voir ce spécimen dans sa maison de vacances !!! On ne m'y reprendra plus, merci bien !!!

Une spéciale dédicace aux secrétaires mal embouchées qui ne font pas bien leur boulot et qui concassent les boulons (j'ai un sale karma, je ne sais pas, je tombe beaucoup trop souvent sur elles, ça finit par user)

Je viens juste de le finir, c'est idiot d'ailleurs, parce qu'à force de lutter contre le sommeil, de m'endormir quelques minutes puis de me réveiller, de m'obstiner à lire encore quelques pages, d'accord je l'ai fini, mais j'ai bien dézingué ma nuit, maintenant, je vais être obligée de me lancer dans un autre bouquin.

Bref : Habillés pour l'hiver, de David Sedaris, 10/18, avec comme sous-titre 22 épisodes de la vie d'une famille presque normale : c'est drôle, rapide et profond en même temps, je vais me jeter sur ses autres bouquins (s'ils sont en poche, krr krr krr krr).

Sinon, j'ai beau aimer le cinéma, qu'est-ce que c'est bien quand Cannes est fini ! C'est juste parce que je suis jalouse de ne pas exhiber à la télé mes pommettes restaurées et mes tics de paupière, je sais...